Title: La Mort Amoureuse: Poésie
Author: Huguette Bertrand
Release date: October 1, 2003 [eBook #4563]
Most recently updated: May 27, 2022
Language: French
Première
partie
AUTOUR DU SILENCE
|
JEUX ET ENJEUX Le temps se
fait vieux le temps se
fait vieux le temps se
fait vieux |
ALTERNANCENous mourons
tous en colère nous voilà
ruines couvertes de
pierres |
TROU DE MATIERECoagulé
dans la mémoire puis vient la nuit |
DÉCLIN DE L'OEILBelle faucheuse ce délire insulte
l'écriture j'hésite encore |
MURMURES FAUVESNul sourire
derrière les murs ce rythme m'endigue puis ça recommence
dans la procréation |
POUSSIÈRE DE RÊVECette chose
qui meurtrit la nuit c'est peut-être
aussi un rêve déshabillé c'est peut-être
même ce mot c'est peut-être
enfin le silence qui me rêve |
BAIN DE LUNEA cause du
clapotis des vagues sur mon dos à cause du
viol des jours à cause de
l'amour pour la mort à cause d'une
cause qui n'en est pas une une pierre
roule dans la nuit froide |
MOUVANCEA l'abri d'une
folie qui tourne en rond sur vos dunes
|
LABYRINTHEPose tes yeux effrayés
près du lit marin si j'osais ordonne |
COUP D'OEILSur les avenues
américaines mais surprends-moi quand même montre-moi
des jeux de soleil montre-moi
aussi des maisons montre-moi enfin des
lieux sans parlure |
TOUJOURS TROPJ'ai toujours
un soleil dans ma poche mais j'ai la
preuve |
UN AUTRE JOURA cause d'une
lente noirceur quel étrange
bonheur imaginez demain vous chercherez
ensuite |
REFLET DU RÊVEMa nuit devient
silence mais il y a
toujours une aïeule les millénaires
m'épuisent et si la terre
brille encore |
SOUS LA HOUSSE DU TEMPSPerdu au fond
des sens les mots eurent
cependant faim de vibrations |
HEURES BLEUESSi j'ai l'oeil
étendu sur la paille prise au piège
par une voisine imaginaire mais je vis
quand même |
PAS VIOLETSViennent des
jours comme ça ils errent
d'une mort à l'autre certains jours
ne s'habituent pas viennent encore
d'autres jours il y a des
jours comme ça |
IMAGES FROISSÉESDevant les
mirages plantés dans l'asphalte mais je n'oublie
pas |
JOUR CALCINÉAu centre de
l'errance c'était l'autre
nuit c'était la
nuit mais cette
nuit-là |
EXTASESous le poids
du soir d'une lèvre
à l'autre viens prendre un bain dans mes veines |
SOUVENIRS FLEURISétendus ils attendent
leurs sentences dans les coulisses |
DANS LE FOUILLIS DES SAISONSLa nuit s'enfuit la nuit s'enfuit la nuit s'enfuit |
FOULE ANECDOTIQUEDes souvenirs
furent oubliés derrière le décor mais le rideau
ne s'ouvre pas ils attendent
toujours |
AUTOUR D'UN DÉLIREQuand le jour
boude ils rôdent
en pointillés |
JOUR FLANEURUn dimanche
se faufile à travers les branches ce jour flâneur |
JOUR D'OMBREAu jour des
lessives ils sont venus
rêver dans ma demeure laissons les
songes à leurs songes |
SOUS LA CARESSE DES MOTSSe saluer à
travers la voix Se reconnaître
à travers une parole intense |
UN DIMANCHE PROPREMenacée par
les grands elle connaît
toutes les langues l'atelier du
monde entre ses mains et quand vient
le dimanche |
CHAIR D'EMPIREMon ami tranquille mon ami subtil mais nos mains
peuvent encore ébruiter l'amour |
PLUMAGE LUMINEUXC'était un
oiseau c'était un
oiseau |
TANGAGESous un ciel
démesuré comme des pierres
resplendissantes je verse alors
ma nuit liquide le jour est
fier |
AU TOURNANT DE LA NUITEn attendant
le retour du déluge |
DÉRAPAGEJ'ai la savate
qui claque j'ai la savate
qui dérape |
ROUGE LE MONDEVous avez laissé
échapper des souvenirs les mains propres |
MÉNAGERIE DE PORCELAINEAu bout de
son sang c'était végétal
et animal blessé c'était je
pense un incident |
NUS COMME DES GLAIVESLes nuits sont
trop courtes des enfants
circulent dans les veines du passé désespérées |
PLAISIR DES PAUMESComme vous
dessinez bien sur ma vie Comme vous
dessinez bien sur mon corps Comme vous
dessinez bien sur mon âme |
PLEIN MATINSi vous voulez
savoir où je suis le silence est un projet qui me secoue franchement |
VERTIGES DE L'EAUIl se peut
que tes douleurs me portent il se peut que je
nourrisse ce désordre il se peut
aussi |
BLEU DÉSERTAu milieu d'un
désert bleu l'hiver dans ses fourrures m'attend |
LE FAUX DU FAUXQuand mes yeux
eurent conquis le soleil mais le ciel
en a vu d'autres maîtres féconds |
CETTE CHOSE QUI NOUS DÉSIRE TANTOn retombe
toujours en soi Jours par-dessus nuits, elle rôde sous des traits tout à fait naturels, sans gravité, nous jetant à la figure des questions de commencements et de fins. J'avoue que je ne tiens plus à fréquenter les phrases intéressées par la chose. Cette chose qui nous arrache aux heures, fait grésiller nos secondes, ingurgite nos devenirs, vient trop souvent interrompre les conversations. Cette chose qui nous désire tant. Laissons-la attendre. Ça lui fera une belle jambe! |
©
Éditions En Marge et Huguette Bertrand
Dépôt légal / 2e trimestre 1993; 2e édition : 2001, 66 p.
Bibliothèque nationale du Québec
Bibliothèque nationale du Canada,
ISBN 2-9802204-3-41 - Tous droits réservés
La
Mort amoureuse |
Deuxième partie
MÉMOIRE
COMPACTE
Il fait un temps rigide
ce matin j'y retrouve les terres
vierges qui m'habitent puisque hier n'est
plus mes mots explosent une guerre synthétique
et brutale s'est soudainement abattue sur mes rêveries comme le temps efface
tout bouleversement je sens circuler à
nouveau l'âge du monde dans mes veines il n'est pas en phase
terminale il rêve peut-être
aux pierres concassées du mur de Berlin la fatigue gagne du
terrain le temps et la distance
me questionnent le doute m'habite je ne crains ni la
mer ni les nuages je m'éloignerai
pour un temps en ce moment je préfère
laisser éclore le présent une liberté
sauvage m'interpelle je me recouche en
me disant que la journée peut bien galvauder autour de moi ça va trop
vite le rideau tombe sous
une pluie de murmures en liberté je fais face à
l'éternel retour du corps devenu fauve quand je respire je n'ai d'autre choix
que de faire quelques brèches ceux d'à-côté
sont là à vouloir décomposer mon présent hélas la nuit
n'est pas venue hier je sens que le temps
n'est plus à la fiction dès que ma
nuit s'endort c'est un peu comme
ces histoires qui n'intéressent personne parfois le dimanche sans cesse ils défilent
dans mon salon je ne suis là
qu'en passant ce jour parmi les
loups se dégrade c'est peut-être
une autre histoire à dormir debout derrière un paravent sans douleur sans
cris lorsque mes images
s'en vont expirer dans une phrase je pose ensuite des
regards indécents sur le monde je peux ainsi énumérer
par leurs petits noms cette fonction renouvelle
le silence figée entre
deux jours trop gris en attendant le lever
du rideau nous sommes jeudi je sais que tout n'est
que projection de ce qui n'évolue pas je lorgne parfois
du côté de la porte sans rien dire il n'y a plus de tragédie |
©
Éditions En Marge et Huguette Bertrand
Dépôt légal / 2e trimestre 1993; 2e édition : 2001, 66 p.
Bibliothèque nationale du Québec
Bibliothèque nationale du Canada,
ISBN 2-9802204-3-41 - Tous droits réservés