The Project Gutenberg eBook of Pensées sans langage

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Title: Pensées sans langage

Author: Francis Picabia

Author of introduction, etc.: Tristan Tzara

Release date: April 1, 2018 [eBook #56892]

Language: French

Credits: Produced by Laura Natal Rodrigues & Marc D'Hooghe at Free
Literature (Images generously made available by the
International Dada Archive.)

*** START OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK PENSÉES SANS LANGAGE ***

PENSÉES SANS LANGAGE

POÈME

PAR

FRANCIS PICABIA

Précédé d'une préface

PAR

UDNIE

PARIS
EUGÈNE FIGUIÈRE, ÉDITEUR
3, PLACE DE L'ODÉON, 3
1919

Chers amis Gabriele Buffet Ribemont Dessaigne, Marcel Duchamp, Tristan Tzara, je vous dédie ce poème en raison de notre sympathie élective.

Francis Picabia.


PRÉFACE


Un courant condensateur désaimante l'étincelle, tandis que l'atmosphère raréfié à l'extrême, sépare les fonds gazeux par une électricité de parafine. Le socle négatif de la machine prend naissance dans une grosse boule, hypothèse d'intérêts de petite taille dans un parc spécial. Les pierres précieuses ont la même dimension accidentellement et en dessous. Pour éviter l'indicateur disponible, la bobine de verre aura la forme de pénétration sur la plaque visuelle d'un tube fugitif ou sur une solution simultanément neuve, munie d'un vide égal à la somme des énergies hors d'usage.

Ce livre est la radiographie des rayons montrant le mieux la netteté voilée des substances qu'exige l'aiguille fermée.

Udnie.


Pensées sans langage


la tête sur mon épaule
comme réponse à ma pensée
et devant moi une figure imaginaire
rappelle mes flottants souvenirs
végétation jolie d'impatience fiancée
conversation d'amour
qui n'est pas un service militaire
je vois déjà la petite croix
garnie d'un ruban
fumant une cigarette
au-dessus des démolitions




j'ai trouvé la poule malade
laisse-moi t'embrasser
câliner en massages le secret de la vertu
joie naïve de bonheur
regardant la fidélité
qui aime les vœux de chasteté
en fils de madone bordel de soir usé




je m'en vais tout bas gracieusement
comme du velours noir
mon amoureuse d'osier
dans la chambre mariée
chantonne sur ma poitrine
le printemps est aux aguets
dans ma chair
comme moi il cherche une langue de chatte
cérémonie de cul
pour voir l'horloge de soie
dans une lettre d'ambassadeur
grosse bête déshabillée




l'amour mange les petits costumes
des jeunes filles
avec une baguette
habillée en chansonnette
le génie admirateur
des promesses
fait honneur
aux songes chapelet
yeux bleux
de profil




le bon goût devrait être le contraire de l'ennui
il est prétentieux et chatouilleux
comme un des sept psaumes de la pénitence
postiche mémoire
dans la librairie du théâtre animé
des insolences d'une réputation théorie
un joli garçon laisse une odeur de cheveux noirs
hippodromes anévrisme Kohol
il y a beaucoup de coloniaux jolis garçons
air de violoncelle
crêpe de chine sous les jupes
son œil prépare la limite parfum
il fredonne le hasard
dans le corridor dramatique




boire une tasse de thé
comme une femme facile




je ne veux pas de cette aventure
dans l'atmosphère fade
dont chaque signe saisit mes mains
avec une odeur vague
de gens du monde
le potin est une sérénade en chambre
dans l'espoir de tenir compagnie
à la vie d'ennui




remarques auxquelles il ne faut pas prêter la moindre intention
mélancolique cimetière anglais
dont la plupart des habitants
ont une fausse position
au cinquième acte




toutes les oreilles sont surnaturelles
mon valet de chambre est le paratonnerre
des bonnes nouvelles
mourir de faim sera toujours
une source de regrets
si vous raisonnez par-dessus toute la probité
le pain et le sel
ont un costume vraiment pittoresque
mais je ne veux pas vous ennuyer
en vous le décrivant




aider ses amis comme vous l'entendez
pourrait brûler la cervelle d'un fou
mais vous pourriez obliger davantage
si vous n'aviez pas le même calibre




le juge questionnait hostile
elle se mit à sangloter
charges graves de complicité
au dessert
les verreries pâles
s'imposent à l'admiration
en reflets discrets du Nord au Midi
fascination profonde
des raffinés du génie




lieutenant du passé espagnol
qui a perdu ses sens




vous voulez une passion
au-dessus de tout le monde
mieux vaut l'abbé almanach et borgne
car cela revient au même
maladie douloureuse
du progrès social
les régions européennes
ont un caractère militariste




poésie anglaise des problèmes de calcul
fée anti-militariste nuisible
du progrès moral




la nappe est mise toute le journée chez moi
affection de vivre avec subtilité
les rues sont vides au Champ de Mars
je suis seul la cigarette aux lèvres
tristesse incurable de fers rougis




concours de tombeaux étalés
qui descendent d'un navire de collection
comme toujours une femme falaise
a un coup de bec sournois
coupé en deux
et l'écume des vagues
a une odeur de poisson fumé
des curieux malpropres dans la nuit
sommeillaient avec un mouvement d'eau-de-vie
enfant mort dans la chambre fausse
gentille et amusante pour la première fois




elle est enceinte
isolée dans le dortoir des humiliantes situations




ma famille rit sur la yole
avec des yeux spirituels
vapeurs symbole d'album
dans un corps champêtre
enlacé dans la campagne impénétrable
comme l'obscurité monsieur le curé
de la grossesse




l'écho chrétien
est une excavation
dans la neige
jusqu'au poitrail
géant goudronné
par le mystère
penché




l'homme cerveau introduisit dans la vie
ce que Dieu n'a pu faire
l'intelligence
Dieu inventa les maladies
l'homme les médecins
Dieu inventa la reproduction
l'homme l'amour
le ciel est froid
sur le bûcher public




connaissez-vous l'amour
l'amour c'est moi si vous voulez
et toutes les femmes ont une ancienne image
et un nouveau chagrin
écho de la torture abrité de gravité
lentement sous la table
la ficelle du docile amant
s'assied dans un lit
côte à côte avec moi
rien que nous deux
fait sourire les femmes
une caresse me ramène la voir
ses mains battent comme un cœur
sur l'idole grasse aux yeux luisants




scène tourbillonnante
comme décor




de la limaille d'or javanais
un coquillage mince entre les cuisses
danse la marche
dans ce corps croquis
la peau poésie accaparée
sourit comme un jeune homme
qui vient d'être présenté
et discret comme un étalage pauvre




vous connaissez le sublime d'une passion bouffie
deux découpures dans le fard des divagations
d'automate cauchemar cosmopolite
la curiosité
s'exaspère dans une haine d'infinie candeur




le charme de l'aube tyrannique
voudrait des enfants violeurs d'ennuis




magnétiquement le lit coiffé de soie
réduit la légende gigantesque du fumeur d'opium




vingt quatre heures à Versailles
saturées d'ennuis
flânerie vicieuse
d'un homme faubourg parisien




gardez-moi de la curiosité
et encore d'autres
vices du chapelet à travers le monde
qui semble endimanché
au contact des vies distinguées
mes compatriotes
voyages exténuants dans l'atmosphère
des muscles ménagerie civilisation




je reconnais la sensation
de mon trac extravasé
les œillades braquées sur moi
nationalistes du théâtre maillot
haleine lourde et ridée
en forme de gare
toute la société inconsciemment
a la hantise du cadavre
mon mal petite idole
devrait me guérir
d'une descente de police
nature qui déforme mon rêve caprice




la pointe du printemps ouvrier
a l'obligation d'ouvrir les persiennes du Soleil
galopades de vaches et valets de ferme
moissonneurs avant l'hiver
d'un beau soir bousculant
les coquelicots d'un songe




aucun mystère femme antichambre
tu empestes la plaisanterie
dans le sommeil des persiennes closes
égratignées d'un regard voyou




toujours insaisissables comme les dollars
les regards de l'amour suprême
vertigineux et sveltes s'enveloppent de luxe
car l'épreuve des beaux morceaux
peut se vautrer
au musée de la lune parfaite
des champs de batailles




toute morale devrait mourir
sous un climat renouvelé d'atmosphère
parasols couchants des terrasses sans scrupules
mâcheurs de fleurs de l'extase androgyne
stupeur qui ricane dans le clair-obscur
des esprits
priez les objets oubliés
vous verrez enfin la peinture cloisonnée
des étoiles candides
dans la cellule du hasard
parfum haillon de grand homme
portant sur l'épaule
son dîner trompeur
récolté entre les murailles d'ardoises
de mon enfance rachitique




le jour est pétrifié dans mon cœur
en tête-à-tête avec mon passé
l'ennui a des nuances jaunes
je le regarde comme s'il devait mourir




connaissez-vous le nez au vent
au bord du trottoir comme de l'eau sale
visage de satyre sous l'air frais du matin de luxe
et le plaisir a un gibier de rendez-vous
spectres derrière une vitre déconcertante
l'espace de l'eau charmant l'ouvrage
garniture de jupon





les contrées lointaines sentent la réalité
bleu exagéré de lumière immobile
vague sourire mal marié
des espèces en face de Dieu




les roses mystérieuses
sorte de pèlerinage sur un petit cheval blanc
démangeaison de la confession sur la mer
amas navré venant au trot
frôlé le long de la route relique
aux aurores de la boulangère




aujourd'hui et depuis longtemps
les ruisseaux ressemblent à des petites femmes
une joie de vivre rêvant tout haut
ça ne signifie rien
pour regarder ailleurs
religions égoïstes de l'humanité
mon visage ressemble aux ruisseaux
mais personne ne viendra
almanach secret des grandes aventures
dans l'escalier
je ne vois rien
mes amis savent tout
feuilles publiques des potins
fabricants de génies et d'imbéciles
opération de toilette
monstres assis dans des fauteuils
illimités




avec des yeux une bouche un nez
sous le fumier aux mouches
les petites fleurs à la surface des marécages
machinalement respirées
dans leurs nudités de lumière
éblouissent l'enthousiasme de la luxure
bibelot de haute banque
en manteaux de soir malade




cette dame est plus jolie
qu'une aumône
de monnaie d'or
ensoleillée
par les oreilles des équipages
que mon enfance imprime
une fois surtout




les exercices de sébile
dans une geôle
comme un corps de noces
agenouillé
rasent
des poissons légers




sur une pierre
où nage un acacia pâle
et mignon
un cubiste m'a déclaré
que j'étais fou




en silence
peu à peu
le bâillement des rêves
insomnies
attirance du mal caché
appelle
la timidité impossible
des planches grimoires




je suis séduit par les passions abus
les fournitures horloger d'autrui
la poche d'un habit neuf
a un trou
pour voir le rosaire du passé




dans la nuque
son manteau de fourrures
est tombé du nid




je vis ma vie anémiée
frottée aux fards de la nature




la poussière des siècles sait la vie
d'une tête coupée
il faut aimer les individus
dans un baiser aventureux
arabesque des poitrines nerveuses
suggestionnant la tradition
vers la mer




une déesse m'a dit
que son caraco cherchait l'insaisissable
aquarelle nostalgique des religions
sphère éventée dans l'enfilade stupeur
j'ai l'œil dans l'eau
à la lumière des bougies
les tapisseries sont peu sympathiques
et mon cœur demeure habité par l'amour
les tasses vides reposent comme les brumes fœtus
derrière les maisons




la réputation vagabonde après dîner
des bouches encore humides
comme une pluie de portraits
sur un mur couleur irrespirable
du sexe des légendes masquées
l'image des hautes colonnes
où les siècles traînent
évolue autour d'un courant rigide
dans l'architecture de notre vie personnelle
génération qui n'aspire dans cette ambiance
cerclée plastiquement
qu'au pavot du geste rapide




quelles charmantes gens les artistes
attachés aux brancards de l'art
je n'ai pas un sou pour acheter une œuvre d'art




montez tous et restez-là
montez jusqu'aux cuisses à tâtons
tout est froid
les herbes grimpantes
ont une odeur clair semée
cérémonieux microscopes
des générations grises
avant-garde tout éveillée
l'argent sans succès
a des relations mystérieuses
en toilette de nuit
mélancolie pressentiment
anti-physique
sans raison comme le soleil




molles ondulations
intérêts et souffrances
bréviaire de salon
épouse humide aux intentions bourgeoises
un cornet de papier a des sons
l'armoire à glace
symbolique danse du ventre des princesses
mon cœur subsiste dans les Maisons de fous
mimique imaginaire d'un pouvoir spécial
le visage humain ressemble à une lettre suspecte
symbole lucarne des péchés




matelots éveillés aux souterrains intimes
15 mètres de large
sur 23 de long




bijou spécial des nuances effacées
Florence est courbaturée par les mots
arts et beauté
on peut entre les cils italiens
comme une main bleue ou pourpre
en quelques minutes
flairer une tirade apocalyptique




soyeux et luisants devant un minuscule public
les instruments morbides
de bois brodé vision
hors de ma tête ont un sexe et un âge




multiplications inévitables
à l'entresol socialiste
billard carambolage du mariage
coliques de plomb facteur de bonne grâce
mais vous savez bien que cela n'est pas sérieux
les expositions de peinture
ressemblent à un régiment de nègres
et les grands hommes sont des confesseurs
théories d'idéals arguments
car la balance aryenne n'est pas inapplicable
dans les bals populaires




comme la virginité des hommes
celle des femmes est une blague
les vierges ressemblent à l'incapacité militaire
coup de théâtre de la morale bourgeoise
je vois seulement des mœurs lâches
questions d'hygiène
qui ressemblent aux caresses de vingt-cinq ans
donc à peu près comme des enfants
dont l'esprit indocile
avec dédain naturel
sans se soucier du chapitre
boutique d'illusions
met le verrou




résonnance théâtrale métallique
impossible de fantaisie dans le prolongement
romanesque de mi-carême
le coup des tempêtes est un pneumatique
défiguré par une grimace à la mode
sérénade dénichée dans la turbulence
ouverte sur une cabine carrée
les naufragés sur le rivage attendent
en quelques parties la marche des calligraphes
dans les anfractuosités comiques des muqueuses
tout cela riant aux larmes
sur le yacht au crépuscule
bougie silence




une tache longue et obstinée
jumelle imperceptible des cœurs romanesques
attaque les bons tireurs en face de moi
les faits divers de télégraphie sans fil
joueurs de tam-tam nostalgique
dragées défiance coup de soleil
armes de parade marquées à la panique
maigre et fluette
rien n'est changé
les trafics prohibés scènes de Paris
étoiles et impresario vedettes d'aventure
taille athlétique absolument vide
d'un coup d'œil piédestal aérien




dans les remous moyens des lames
cyclone ferré
en parasol d'autruche
l'heure comiquement a un doigt sur sa bouche
avec des airs comestibles
rascasses au nez chaud
talents mondains cabotins hors de vue
escortent les illusions chères délicieusement
un héros devant une femme
est un être surnaturel comme les langoustes
les pieuvres
et les hautes herbes




tout homme chargé de missions
a des yeux
nerveux aux beaux gestes
accessoires
d'amour docile contre la misère
des cœurs entrevus au ciel azur
or faussés
dans la direction d'artificielle indulgence




il y a un mois une étoile filante
légère et rapide
sous ma fenêtre
tapait à ma porte sous le nom d'estomac
son visage enveloppé dans une large voilette
sauta à terre
mais c'était une photographie
présent et passé odieux
qui réduisent l'heure en schrapnell




il ne suffit pas de produire avec succès
l'hôpital prisonnier
gilets sans boutons
les marches du perron nous fusillent
mal réparable
soldats vins supérieurs d'empoisonnements
les événements de ma vie
se passent dans la sauce
des pulsations de mon cœur
et je fouette les chats
pour me laver de leurs caresses
vous verrez qu'un de ces jours Anatole France
deviendra voyageur au long cours
avec un pensionnat de jeunes filles
d'un pays quelconque




voilà monsieur madame
ce siècle a un charme ravissant
les réformés deviennent inutiles
on a des enfants quand on veut
simple question d'hygiène
pour ne pas en avoir
la sience est antiseptique
l'amour ne l'est pas sur l'oreiller
avoue humblement que tu n'ignores pas les mauvais lieux
aux instants polygamiques




sensualité exacte par dessus le marché
pour la virginité vexée de l'aspect romantique
du mois de septembre
crème à la vanille
ou escamotage dément
des gueules sous le pseudonyme de nature
victoire des feuilles qui tombent
vers l'étage des corruptions divorce




notre vie baisse le nez impassible
comme le ciel réflexions de l'eau Suzanne
scandale des bibelots que mon œil
achève par la suite
trépidation des trains
ou vives jouissances des Messalines
les eaux minérales ressemblent à la musique
Eve et Adam membres de l'institut




valsent dans le salon jarretelle héliotrope
et le baryton est dreyfusard
hier soir le Mont Valérien
s'amusa dans l'air fatigué
du reste de ma tendresse
envers la fausse barbe de la vie




l'art américain blanc et noir
circonlocutions embrouillées
d'alcooliques relations




«Modern Gallery» boutique au premier
a l'aspect romantique d'un carambolage
galerie avec dédicace
c'est ça qui est bon
blonde délicieuse
morale confuse
qui vous étrangle
avec petitesse
momie ou grandeur de cœur
c'est très gentil mais c'est fini cambriolage
ver blanc sur les pelouses à mesurer le pouvoir




insigne bonté ne désespère pas
de m'escroquer le remords ridicule
entr'acte au saut du lit
j'ai malheureusement une rose erreur
le charme fait autour passera
quel soulagement de temps en temps
une blague à la mode
gloire de ne plus revoir
un éloge de gaz pavillon
musique de muffle




les couvertures bleues dorment
à heure fixe
et reflètent le ciel préfecture inanimée




s'aventurer aux Etats-Unis
devient le terme qui favorise
une digestion artificielle
suc gastrique de grenouille élastique
osmose complexe de la vie quotidienne
les microbes des blanchisseuses
s'accrochent au tamis
des dames de la poste
de Potsdam
en souvenir de mon ami
visage de docteur homéopathe cubain
pulsations ondes radiales
des tribunaux infirmes




aujourd'hui sur la terre
le campagnard décroît
concurrence avec recettes
des entraîneurs laborieux




mourir fini de respirer
à grands pas sortie professionnelle
escapade sur le bras du fauteuil
musique dans la tête
les yeux indéfiniment argumenteurs
conseillent le prêtre narcotique
poumons accroupis autour de quelques jours
assise dans ton lit
la vie enfantine de la mort
a la gaîté des histoires mécaniques
semelles horloges moribondes




les objets n'ont plus de couleurs
mais leurs ombres ont leurs couleurs
un de mes amis
qui a la clé des docks
pense de même
c'est dans quelque chose d'inconnu
et le ciel habite l'inconnu
quel bonheur
d'avoir un flair infaillible
et de savoir vivre
comme une grande dame
de Shakespeare




long silence coup de poing os
coucher de soleil sur un nez mince
grimace des eucalyptus
dans une cave
il faut descendre pour sortir
amazones dans une église oiseau




la pluie de la mer se fige
le balancier
a le visage mort
confondant l'intelligence résurrection
dans le cimetière locomotive
dont les lanternes brillent
épuisées de fatigues
sur deux roues monstrueuses
géant de café-chantant
dernière rencontre en landau
excès




les mains ont une signification républicaine
les moustaches avec rez-de-chaussées
argot limonade
faites passer un sourire aimable
avec envies disputes
hourras




lisez mon petit livre
après avoir fait l'amour
devant la cheminée de caoutchouc
décor nouveau de dévouement
vision que la sagesse marque
de bonne cuisine
grimper dans les milieux sportifs
avec un fil de soie Tenor
bousculer les sexes
avec un éclat de rire
l'éminent peintre moderne
sourit de son talent
ayant servi aux autres
agent de livraison
d'ameublement intrigue
dans une beauté fatale
c'est la plus belle occasion




d'alarme nouvelle
pour tourner le dos




la vie a sa guise
tout bonnement
sans idées généreuses
la vérité paraît toujours médiocre
devant les espaces fermés




un chapeau
est lâche ou courageux




et la lune monte avec impatience
dans l'autre sens
stock d'intentions
déshabillées
qui naissent et disparaissent comme les planètes




tic tac au bain de vapeur
il fait Toujours un Temps admirable aux bains de vapeur
en attendant l'heure le front sérieux
l'intelligence se perd
comme un porte-monnaie




le corps vibrant sans dire un mot
je reviendrai comme si l'air immobilisé
d'embonpoint
à l'abri des excès
était payé par moi




contact d'aventure de goût
petites caresses bonheur sensuel
comme de grands desseins destinés à la gloire
mon amie ressemble à une maison neuve
à une rampe luisante
pouf de soie martyre d'idéal
destiné aux croisades




enlacés par l'amour
sous le voile des romans sérieux
odeur du soleil
dans une ville du midi
gestes lents cravates
montrant des seins de province
le viol silencieux
est mouillé jusqu'à la fin
pas grand'chose




un chapeau de paille d'acacias
sur les cheveux des murs guinguettes
chambre en chambre
nuits passées horriblement heureux
sur les reins pudeur
il y a dans le monde le législateur des bonnes consciences




que le ciel châtie
piment quotidien
ambassadeur secrétaire
pour l'étude des plantes
conjugales




renommée aux plaisirs inféconds
démolisseur de ruines
pauvres toasts
voiture auréole échouée sur la mer
où s'enlise le gouvernail paroissien
la machine à coudre argentée




amuse mes yeux
dans le luxe
d'une bouche mariée
jupe courte
gaz de fourchettes allumées
chamarrées de monnaies adulations
dans un verre ouate
ou les dents whist
splendidement possibles
sous la lumière à tâtonnements
jettenl les fiancés sur un lit trouvé




panier à ordures nuptiales
les femmes se parlent à elles-mêmes
deux amoureux
s'embrassent avec luxe sur la bouche
sourire emporté
extase de la chaleur sur le siège
du boudoir
infini fatigué




des yeux clos
strictes politesses
les imaginations ont le regard fixe
le ciel est en bas
et la terre est en haut
sous la promenade des corbeilles
l'enfer est sous-marin
barrant la route
mais la monstrueuse vie
a des cheveux en bandeaux




la misère est illustre
comme un dieu triomphant
en gestes circulaires




elle a la couleur des petits bas gris
belles courtisanes sous l'avalanche
des ambitions




d'un seul bond sublime but
d'être si pur




tendresses de poèmes dans la solitude
qui déshabille les rires du Théâtre




le bonheur des autres traverse la rue
vers l'inconnu rallumé
au fond
vers les étoiles lumineuses
camarades des soirs sans corsets
gestes extravagants des bagages entr'actes
emportés vers l'idéal bourgeois




les voyages des araignées
magnifiques rythmes
vêtus d'un peignoir surprise
en palissandre de l'âme pendule
sur le marbre des visites
personne guéridon
vin d'Espagne débraillé
venu de là




où la vendeuse de l'herbe morte
avec un crêpe autour du sein
travaille à son gré
serrée par le froid
qui voltige
comme un colosse
avril post-scriptum
chronique d'un trou presse-papier
il faudra une contrebande
en ouvrant les tiroirs du hasard




chez un marchand de primeurs
les étiquettes
m'effleurent aux tempes
j'adore les drapeaux qui ont des petits noms de guerre
dans la bibliothèque bonne binette
quelle différence
avec une serviette en maroquin
Paris critère de l'intelligence
à ruban rouge
au détriment
de l'amour
et des chants




ô mes contemporains
je ne comprends pas vos chiffres
vous avez tous l'argot juif banquier
couvée de guenilles
habits noirs des amateurs parvenus
ivresse difficile
et digestions lentes
de l'approbation de l'argent
en chausson élastique
au soleil sang pur
et regret de la siphylis espagnole
et du nègre acrobate
monstrueux congénère
mains nonchalantes
heureux du monde
confiance publique
à payer son loyer




amour étonné
n'est-ce que cela
le foyer est en débâcle
et la femme amoureuse
cherche le diamant perdu
il faut à coup sûr
ne pas traîner des poids lourds
regrets anatomiques
ou boutiques démodées
bel endroit pour s'y tenir
mais le tourbillon
continue avec ses armes




vous savez que j'ai besoin
des perspectives de brouillard
et d'un bout de chaîne
négligemment distrait
canot automobile
comme les lunatiques conséquences
d'un stéréoscope prolongé
dans un café turc




la pluie tremblante tombe douce
parmi le supplice futur
d'un besoin chuchotement
de luxures
rêves de nuit précis et pratiques
puissance dans un miroir
les détenus semblables
contre les murs sans draps
regardent l'heure absente
sans indifférence pour l'avenir
et bercent les grilles cruelles
avec des petits yeux garantis




un malheureux sorti de prison
marche en silence au bord du fossé
des chimères bohèmes




peu à peu en sifflotant
la bougie s'endormit
et ronfla




jusqu'à l'horizon le bonheur
coiffé de place en place
met le feu aux hannetons des sciences
les uns sur les autres
et la mer jette en l'air les idées
des ornements habillés en polichinelles
mondains—. . . . . . . . . . . . . . .

Terminé à Paris le 28 Avril 1919.

P. S.

A tous ceux que démange l'envie de dire que ce langage est sans pensée je conseille la visite dangereuse du jardin zoologique.