Première
partie
Suis
en amour avec le jour qui passe près de ma fenêtre par-dessus ma chair ruisselante d'avenir sous un amoncellement de gestes fous que l'histoire raconte pour bercer la petite fille Suis en amour
avec la nuit qui passe Suis en amour
avec les mots d'amour |
Devant
toi comme quelqu'un qui attend qui attend que la nuit soit consommée en attendant que tu sois là l'âme à nue en plein coeur du rire envoyée dans tous les sens débridée par les mots écrits comme ça en plein jour en pleine nuit alors que les coeurs s'entrechoquent à travers les ondes provoquent des signes amourachés tendres Comment résister
aux mots désordonnés Comment résister
aux heures arrogantes Un silence
dérobé à l'envie d'être là |
Parmi
les feux de la nuit ce parcours du silence de ton âme secrète s'abreuve à la source de nos avenues intimes jusqu'au tréfonds de nos corps lancinants comme un puits si profond d'où surgissent les vertiges du matin ses accords sur la portée du coeur à n'en plus finir L'amour se
consume |
Les
doigts du ciel effleurent le sanctuaire de la folle amante gonflée dans la poitrine du vent et d'inutiles colères se heurtent aux douleurs des griffes emprisonnées dans les veines du temps Les lèvres
s'habituent aux désirs Cernées les
images passent |
Le
temps mon frère vient d'arriver avec en poche le poids de ma fragilité déposée aux pieds de la tendresse parfois emportée par le vent du large ses milliers de p'tits papiers accrochés au fil des jours et du printemps venu râteler ses émotions éparpillées sur le gazon |
Dans
la prison du désir je tue les heures une à une sans blesser les instants de l'espace amoureux sans piétiner les sourires sans mélanger la couleur des gris trop gris sans mourir sous le toit indigné par la caresse des jours sans suivre le cours du rêve inachevé des lendemains avides de temps À même cette
prison |
Oui
je rêve que je ne rêve pas dans le délire de tes nuits dans la conscience du jour cette envie de colorer tes arcs-en-ciel aux prises avec les nuages assise sous le chêne à brouter des impatiences dans la gueule du temps ce temps empanaché d'étoiles de fils d'araignée quand la voix cherche les contours d'une présence pour la suite du jour |
Ma
vie se berce au creux de la mémoire d'un amour retrouvé comme un mystère entre les seins affolés par une nuée d'interdits En proie aux
fièvres Les bouches
lasses se cueillent |
Demain
est toujours un autre jour qui nous suit pas à pas dans les décombres de la nuit ses rêves immobiles sous l'oreiller poursuivis dans le plein des silences qui charrient à distance les feux de l'âme cette distance que l'oeil inonde pour nettoyer les passions refoulées dans les abîmes d'un poème qui ne veut pas se taire un poème à la mesure du coeur aiguisé par la lenteur des heures à bout de cris |
À
l'approche de ton corps nu ma chair goûte tes fièvres de la courbe de tes rêves à la pointe du vertige et l'ivresse de mes lèvres déclenche le délire cette sauvage volupté quand mon souffle te parcourt satiné Se cambre ta
raison |
L'amour
veille dans le silence advenu ce silence ému par le vertige des jours jours de peurs jours des alentours défaits jours qui parlent tout bas jours évidés des sens jour dans la descente du jour long cortège des jours abandonnés à leurs songes |
Ce
jour n'en peut plus de dormir si tard dans son lit cette âme qui dort tout bonnement dans sa nuit un pan de nuit accrochée à la vie quand la vie se mesure à nos pas piétinés quand la vie nous rassure dans le délire des ombres De toutes ses
coutures elle craque |
Le
soleil me joue des tours projette dans mon regard les jours étourdis par de trop grandes extases accrochées au clou de mon âme en attente du prochain soir violacé Par une fenêtre
du coeur |
Tu
peux toujours croquer quelques mots pour déjeuner pour accrocher les soucis dans l'oeil figé du temps qu'il fait dehors les branches tendues aux quatre vents |
Quand
un grand vent souffla sur la peau de l'automne elle prit la fuite et une chemise au hasard en parlant de rentrer dans un portrait de famille sans parlure sans ambiance puis revint ranger cette randonnée là où elle l'avait laissée juste sous le ciel étoilé de son lit Elle rêvait tout simplement |
Suite
de nuits que l'amour embrase de toute éternité pourchassée par le crime de n'être pas assouvie quand le souffle brusquement s'arrête dans le regard plongé au coeur d'un arbre d'automne comme une bête blessée fouettée par le vent et toutes ses feuilles qui gisent sur le sol défait Vive mémoire emportée par les rafales du temps |
Il
pleut des joies dans mes yeux des arcs-en-ciel sur mes épaules des délires crachés par la mer ramassés par une vague silencieuse à la lumière d'un vieux rêve taillé sur mesure Il pleut des
odeurs de cheminées |
Connectés
à l'amour aux cordes des guitares celles trempées dans l'acier de l'aujourd'hui les lendemains paralysent le retour de quelques larmes appuyées sur les murs des maisons de novembre Que viennent
les musiques à pleines mains |
Dans
la blancheur de l'être le coeur cultive un rêve abandonné dans les couloirs de la nuit parmi les angles et les assauts du regard venus explorer les fractures de l'âme ces traces fragiles qu'un silence inonde |
Froid
comme un hiver le bonheur se cherche un abri dans le bleuté des nuits porte le vague souvenir d'une main affolée comme une caresse sur l'éveil du jour en attendant une brassée de coeurs flottants L'amour et
ses trouvailles |
Côté
coeur y a rien d'neuf à part le feu qui ronge ma langue quand les jours se cachent dans l'ombre Y a rien d'neuf
au bout du jour Y a rien d'neuf
au bout d'la semaine Y a rien d'neuf
au bout du coeur |
Quand
tes musiques folles m'écoutent trop longtemps j'ai envie de faire trembler le jour qui se promène dans ma nuit d'envoyer mon âme en voyage pour la faire durer de chatouiller le soleil en faisant ma valise d'écrire des mots d'avance en cas de panne te parler au creux de mes phrases te chuchoter mes souvenirs ramassés en petits paquets d'émotions À travers la
buée de mes espérances |
Derrière
les montagnes on aperçoit des regards vagabonder çà et là entre les arbres comme des sourires prolongés jusqu'au faîte de l'âme On aperçoit
dans le tard des nuits Les jours nous
regardent dormir |
Dans
la cambrure du geste apparenté à l'infinie démesure ce temps passé tout contre vous enjolive les anciens printemps demeurés soudainement muets par temps de grands vents quand le destin fait rage Le corps comme
un oiseau partage les tempêtes |
Comme
une brise roucoulante venue s'échouer dans le cou de l'aube le corps transperce les nuages de mon âme et la chair de l'image qu'au loin je contemple tout près pour étancher la soif pour apprivoiser les battements du coeur dans l'instant |
©
Éditions En Marge et Huguette Bertrand
Dépôt légal / mai 1997, 70 p.
Bibliothèque nationale du Québec
Bibliothèque nationale du Canada
ISBN 2-921818-14-0 - Tous droits réservés
JUSQU'À L'EXTRÊME REGARD poésie de Huguette Bertrand |
Déchirée
par les départs toujours présents la douleur s'apaise quand le souffle rejoint le geste ce battement de vie à même ton âme greffée à la mienne Coincée entre
l'espace et le temps À travers une
verrière |
Allongée
sur les paumes du quotidien une femme de connivence avec le bonheur s'abandonne dans un fou rire pose délicate comme un fruit incandescent qu'enrobent les désirs venus valser sur ses nuits apprivoisées une femme moulée dans ses parures pour une fête empirique transparente parfumée visitée par les saisons inscrite au calendrier revue et corrigée par le mouvement perpétuel de la tendresse On imagine
aussi les mains déployées |
Quand
la vie m'étire à n'en plus finir j'étire l'avenir jusqu'à demain j'étire demain pour en finir avec l'avenir j'étire mes mots pour allonger le verbe je m'étire dans mon verbe pour conjuguer le désir à l'être et n'être plus que l'étirement d'un désir sur une distance allongée posée sur le temps un temps étiré par le hasard d'une rencontre une rencontre qui s'étire sur le devenir comme si demain n'existait pas Pour en finir |
Juste
un peu plus de vie pour prendre l'amour par le goût quand le goût a le goût d'aller dormir près de la nuit cette nuit qui veille sur l'amour comme une vieille amante échevelée au goût du jour pas trop tannée juste encore en vie pour goûter aux nuits échevelées par l'amour |
Elle
est venue elle était peut-être déjà là debout en pyjama sur son destin dans sa chambre virginale appuyée sur un dégoût en attendant la conquête des seins des reins et autres viscères dépliant sa nuit sur le coeur englué dans son imagerie Finalement |
Devant
les jours de banlieues le temps s'attriste ces îles roses à l'intimité fragile îles boiteuses à des années-lumière îles poisseuses dans le varech des regards îles érigées à la gloire de l'éphémère îles savantes pour dérouter le mouvement des foules îles languissant comme des pluies îles mortes déclarées sans avenue îles ennuyeuses remplies de crépuscules îles éclatées en plein visage de la vie |
Vous
avez dit amour quand on vous aperçoit aujourd'hui plongé dans un bain de tendresse pour savonner les mercredis oubliés vous écrivez amour sur le bout d'une table entre deux feuilles grises deux colères et vos gestes dévastés par de trop longues heures Se grave enfin
sur la chair de l'autre |
Je
bois à la source de vos mots délivrés temporaires quand la vague soupire quand le corps n'en peut plus de vous regarder dans l'embrasure des montagnes à travers le songe de vos regards venus si près de toucher l'indécence ce velouté du coeur jusqu'au vacillement des sens déboutonnés jusqu'à l'os C'est de l'amour C'est de l'amour |
Qu'avons-nous
à dérober ces gestes qui ne craignent plus la pudeur d'embrasser le poète dans les eaux grouillantes du délire ni même de tremper nos doigts dans le suc de l'amour comme une rosée sur le bonheur d'être assouvie par de tendres ébats ce repas que le coeur attend avidement à travers la bruine des jours ce doux mensonge pour un monde inventé par la blessure de ne pouvoir aimer à n'en plus finir |
Quand
il fait trop nuit un nouveau regard vient border mes rêves abandonnés sur le rivage qu'une simple lueur vient consteller Mémoire de
la main qui effleure la mémoire Une flamme
ardente vient chanter sous ma lampe |
Ne
pillez plus ces nouveaux jours quand le soleil verse son or sur nos chairs attendries par l'âge des pierres quand nos yeux pavoisent devant ce rêve emmitouflé dans un rayon de lune quand le galbe soyeusement apprivoisé cherche les contours de la main qui effleure Sous l'écorce
de nos vies Surgissent alors des amours effrontées |
Dans
la savane de nos âmes des loups s'y promènent avec un goût de représailles à portée de hurlement étrangeté qui ressemble à une vocation jusque-là étendue sur une plage devant une mer de naufrages de cris douteux |
En
vérité c'est de toi cette senteur du jardin jusqu'à l'extrême regard incendiaire à la poursuite des patiences et des pluies venues Encore toi Toujours toi |
L'hiver
ne pensait pas qu'il était rendu là où il était sous une pluie de glaçons barbares venue blesser la conscience des arbres nus leurs bras ballants comme chômeur sans cause et pour cause L'hiver venu
a dérapé sur sa neige fondante |
Encore
tout chaud mon jour incendié par l'abondance du rêve sème dans les sillons de l'amour un visage habité de réels immenses une gueule à désir flanqué d'un sourire limité par la séduction d'un regard efficace une peau de sable fin arrachée aux plages Entre des pieds
acrobates |
Les
yeux assoupis dans une vague d'espoir retournent au rivage cette écume de l'émoi Dérive des
jours insensés |
Ce
corps inouï emprisonne le soleil dans un doute que supporte mal le ciel blafard Ciel de tous
les regards portés sur la chose De feu de sang |
Après
maints combats le coeur essoufflé s'endort ensoleillé porte en moi ce plaisir de brûler dans l'ombre Ces seules
lignes décochées sur la cible Posez un timbre
de voix sur le mot |
Assoupis des fragments d'été brûlent sous la peau comme une promesse aux herbes folles dans un corps à corps avec les étoiles Lents mouvements
inclinés sur l'âme affamée |
Où
veux-tu que je dépose mes caresses lorsque la lune est rouge lorsque mon cri échevelé vient te dire que l'amour fermente sous le lichen lorsque tu danses près d'un gouffre de lumière lorsque tu marches sur des plages garnies d'apothéoses et de galets hors saison lorsque la mer me confie son silence me propose ses regrets comme la terre ses alarmes lorsque tu ruisselles sous l'écorce de tes nuits inventées lorsque je traverse le pont de tes rires téméraires lorsque enfin nos mains fleurissent sous un grand pin argenté |
Dans
les chairs roses du ciel une lune magique pose sous le regard des jours irrités par la rage des heures folles Heures de plomb
à l'épaule |
Votre
folie m'habille comme un gant si près de la lumière si près des heures libérées par la foudre de vos rires en relief sur mes mots éventrés par les silences les oubliances que je suis à même ce jour imprégnée d'alliances d'enfances étalées sur mes crépuscules ce foutu mensonge |
J'ai
les écluses fragiles dans le regard de l'aube quand mes mains s'abandonnent au vertige des mots devant ce phare absent devant l'image rebelle d'une nuit furieuse pluvieuse |
Au
passage les baisers creusent des habitudes au hasard des fatigues lèchent le destin étroit d'un visage oublié dans le givre des heures visage abandonné sous le doux regard d'une étoile lointaine quand la fête déjoue les ruses d'un soir exténué |
Une
promesse de chairs odorantes provoque des printemps délurés des échanges de rêves effrontés derrière une foule triste essuie gestes et marées sur les visages à portée de l'esclave |
Sur
ma page des mots ondulés me respirent jusqu'au sein du rêve me ramènent au coeur des choses à travers le cristallin de l'âme ses ébats dans la chaleur des sexes poétiques évanouis comme des mystères déraisonnables |
Un
cheptel de mots avance lentement vers l'écrin fertile de mes pensées en meuglant des souvenirs désespérés sous le dernier quartier d'une lune d'hiver |
Ce brasier
du coeur brûle les ailes Femmes de bois |
Frémissante elle reconnaît les cris comme une exaltation secrète de la source ses passions qu'elle boit à même la bouche des échos rythmés des instants convertis à l'être autrefois bafoués sans mémoire rejette par ses paumes entrouvertes la raison trébuchante qu'aucune foi ne peut atteindre dans l'aube assassinée |
Il
fait jaune feu dehors à travers les arbres déchus et mauves devant ce jour poudré d'indifférence égaré dans le vin de l'aube ennivrée Comme un rendez-vous
avec la mémoire Tranquillement
demain me lira |
Une
mémoire constellée glane les langues assoiffées mystère des mots sanctifiés par le poète sous l'emprise d'un verre offert pour évaporer les désirs inconscients de l'Être dévorantes failles engorgées de désirs décapsulés bus jusqu'à la lie |
Au
coeur de l'essentiel le silence mijote des réponses condamnées à éblouir les peurs à hauteur du vrai en ce jour dessiné inévitable aux aguets |
Rage
folle des amours punitives doux labeur de questions pour nos âmes affamées Rage folle
des amours démembrées Rage folle
des amours déchiquetées Rage folle
des amours libertaires |
Cette
femme désertique apprend en silence mais le silence ne lui répond pas Elle se chuchote
les mots amoureux du temps Elle rêve Abandonnée
devant un soleil trop pur Le meilleur s'en vient ! |
©
Éditions En Marge et Huguette Bertrand
Dépôt légal / mai 1997, 70 p.
Bibliothèque nationale du Québec
Bibliothèque nationale du Canada
ISBN 2-921818-14-0 - Tous droits réservés
version html de ce recueil sur le site de la Bibliothèque nationale du Canada -1997 http://collection.nlc-bnc.ca/100/200/300/huguette_bertrand/jusqua/regard.html Site
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